Le tourisme, plus de 2 siècles après son apparition en Angleterre et aux Etats-Unis (Duhamel, 2018), a subi de nombreuses transformations. D’abord tourisme de luxe pour les aristocrates en quête de bains de mer, de montagne, de grands espaces naturels ou encore de patrimoine, il s’est ensuite massifié tout au long du 20ème siècle. Ce tourisme était principalement présent dans les stations de bords de mer (Coeffé, Violier, 2018) répondant au « désir de rivage » de nombreuses populations (Corbin, 1988) ou en montagne (Knaffou, 1978). Jusque dans les années 1980, c’est principalement ce type de tourisme massifié qui est promu. Depuis, une diversification à la fois des types et des lieux du tourisme a eu lieu. Des stations touristiques sont entrés dans une phase post-touristique (Brulay, 2007 ; Violier, 2002), où le tourisme a laissé place à d’autres fonctions notamment par la résidentialisation. Le tourisme s’est aussi diffusé dans des espaces autres que ceux à fonction touristique régional (Piriou, 2020), vers l’arrière-pays (Pihet, 1996) voire vers des lieux ordinaires (Condeveaux, et al, 2016). Cette mise en tourisme généralisée répond à ce que certains appellent la volonté expérientielle par le tourisme, promue dans une société individualisée par les acteurs et chercheurs du tourisme (Duhamel, 2018). Cette touristification atteint même la vie quotidienne et le « domestic tourism » (Deely, et al, 2023), c’est-à-dire du tourisme à la journée ne nécessitant pas une nuit d’hôtel. Elle rejoint plus généralement la mise en festivité de la société urbaine, se réalisant à la fois dans les villes (Gravari-Barbas, 1998) mais aussi dans les campagnes (Brouard-Sala, 2021).
Ce séminaire vise à interroger les spécificités des conflictualités identifiées ou émergentes dans l’habitat en rapport avec le tourisme. Il s’agit d’abord d’interroger les natures de ces conflits. Certaines ont déjà été décrites, que ce soit en rapport avec le sur-tourisme ou « over tourism » en contexte européen (Duhamel, 2023), par exemple en Espagne sur le chemin de Saint-Jacques de Compostelle (Lopez, et al, 2019). Dans certains cas, la sur-présence des touristes est régulée par des institutions, notamment de protection de l’environnement (Pupion, 2010). Les conséquences sur le logement sont nombreuses et quelques- unes ont déjà été identifiées surtout l’augmentation des prix immobiliers et difficultés d’accès au logement (Delaplace, Simon, 2017). Le développement de la plateforme Airbnb est principalement visée dans divers contextes mondiaux (Opillard, 2018), notamment à Angers (Fadel, 2022). L’actualité de ces questions est aujourd’hui redoublée, quelques mois avant le début des Jeux Olympiques à Paris, où beaucoup critiquent les conséquences urbaines liées à l’évènementiel sportif. Ce séminaire souhaite également interroger l’expression de ces conflits notamment en rapport avec la « rupture de contrat entre habitants et touristes » (Duhamel, 2023).
Comment les habitants luttent- ils contre la présence de touristes (Opillard, 2018) ? Comment les touristes perçoivent ces luttes ? Quelle est la prise en compte des institutions locales par rapport à ces luttes ? Dans ce contexte, les contributions attendues devront s'inscrire dans au moins un des axes suivants :
- 1/ Décrire et recenser les différents types de conflictualités périurbaines et leurs évolutions.
- 2/ Analyser les modalités d’expression ou de traduction des conflits.
- 3/ Analyser les stratégies de gouvernance permettant d'atténuer les conflits ou de les désamorcer avant qu'ils n'éclatent.
- 4/ Faire état d'expériences remarquables ou d'études de terrain menées dans ces directions. Une attention particulière sera portée à la dimension comparative internationale.
Déroulement du séminaire
- Journée du 13 juin : présentation de travaux des chercheurs et chercheuses
- Matinée du 14 juin, visite-terrain dans Angers.
- Après-midi du 14 juin : visionnage du film Mayapolis avec le réalisateur Renaud Lariagon en visioconférence.