Aline Le Failler

Les initiatives alimentaires se sont développées ces dernières années dans un contexte de précarité alimentaire accrue et de crise climatique toujours plus tangible. Documentées par la littérature scientifique, elles permettent à différents groupes sociaux de manger, palliant certaines inégalités structurelles (inclusion sociale), mais aussi de questionner et rapprocher les différents acteurs « de la fourche à la fourchette », jusqu’au retour à la terre (inclusion matérielle). Ces initiatives sont en effet portées par des collectifs qui produisent, transforment, distribuent, mangent et compostent : elles recréent ainsi des formes concrètes, quoique incomplètes voire paradoxales, d’environnementalisme ordinaire tout au long de la boucle alimentaire, qu’il semble pertinent d’observer de plus près.

En empruntant les cadres théoriques de la justice alimentaire et environnementale mais aussi de l’environnementalisme ordinaire et des pratiques populaires, cette thèse fait l’hypothèse que la transition sociale et écologique peut se déployer depuis les organisations collectives, de façon ascendante et localisée. Dans quelle mesure ces pratiques collectives alimentaires dessinent des voies de transitions alternatives au système agro-alimentaire conventionnel ? En quoi les initiatives observées inventent une forme de « justice alimentaire écologique » ?

En partant de deux quartiers nantais, Bellevue et l’île de Nantes, nous analysons les initiatives alimentaires alternatives qui s’y déploient, allant d’une ferme urbaine à une épicerie ou un restaurant solidaire, en passant par une coopérative de maraîchage-restauration et jusqu’à la collecte à vélo de matières organiques. L’observation participante des lieux et des pratiques, les échanges et entretiens avec les acteurs ainsi qu’une analyse qualitative des flux alimentaires générés chercheront à mettre au jour les dimensions spatiales, matérielles, mais aussi politiques et d’inclusivité portées par ces initiatives, tout en interrogeant les opportunités et limites rencontrées pour passer d’une dynamique d’innovation à une dynamique de transition.