Cette thèse s’inscrit à la croisée de la géographie sociale, de la recherche-action et de l’épistémologie des savoirs géographiques. À partir d’ateliers en classes élémentaires de trois écoles rurales de Normandie-Maine, ce travail expérimente un processus méthodologique itératif et interactionnel visant la production graphique, verbale et para-verbale et l’analyse de savoirs socio-spatiaux d’enfants de 6 à 10 ans vivant en espace peu dense. Elle documente les savoirs géographiques locaux et pose l’hypothèse d’une construction enfantine de l’espace géographique et des rapports sociaux —déjà préhensibles. En interrogeant de façon systémique pourquoi et comment apprendre l’espace géographique avec et par les enfants, je prends appui sur la tension structurelle entre École et Société et envisage l’école non plus comme seul lieu d’apprentissage scolaire, mais comme lieu de production de savoirs pluriels situés. La géographie déplace le regard porté sur les savoirs scolaires pour le centrer sur le potentiel d’une co-production des savoirs géographiques locaux. Parce qu’elle est ancrée dans l’expérience singulière d’un espace commun, la géographie scolaire est un espace-temps de discussions géographiques et démocratiques qui permet à chacun.e de construire sa place dans le monde. Pour ce faire, l’élève doit d’abord redevenir un.e enfant. À cette condition sémantique et didactique, nous pourrions, faute de certitudes en l’avenir, ramener l’enfant à son désir premier d’apprendre, son regard interrogateur sur le monde, l’expérience qu’il.elle en fait dans la diversité et la complexité de l’espace socio-géographique local. L’enfant considéré.e comme être humain, social et sensible singulier, y compris et surtout à l’école, peut devenir un sujet agissant dans et sur le monde, aller à la rencontre d’un savoir habité et faire société.