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Observer, animer, rechercher. Enjeux méthodologiques éthiques d’une co-production de la ville avec les jeunes.
Marie-Anaïs Le Breton. Observer, animer, rechercher. Enjeux méthodologiques éthiques d’une co-production de la ville avec les jeunes.. Engagements, CNFG, May 2023, Valenciennes, France. ⟨hal-04741278⟩
La recherche-action est guidée par la volonté de transformer une réalité (Bradbury et Reason, 2008) jugée problématique par un ensemble d’acteurs. Dans notre cas, il s’agissait de répondre à la question « comment faire la ville avec les jeunes » ? Pour cela, nous avons mis en place deux expérimentations, qui sont deux situations de recherche-action, au sein d’un établissement scolaire et d’une maison de quartier. Ce choix nous a à la fois permis d’approcher la question de la participation en étant acteur de la démarche, et de construire une posture de recherche centrée sur l’action (Catroux, 2002). La proximité et l’engagement comme approches développées au cours des expérimentations posent des questions particulières, et il nous semble que cela est d’autant plus important qu’il s’agit de publics jeunes (Robin et al., 2017). Tout au long de notre implication au sein des expérimentations, nous avons pris conscience, progressivement, que l’objet de recherche que constitue la participation des jeunes n’est pas neutre : d’une part, parce que les dimensions éthiques et scientifiques sont d’autant plus indissociables que la recherche porte sur des publics adolescents (Oppenchaim, 2011), et d’autre part, parce que la recherche sur la participation des habitants peut comporter une dimension militante (Mazeaud, 2012) qui se manifeste par l’intention d’émancipation des individus en s’engageant dans l’action sociale (Herr & Anderson, 2005). Dans le cas des publics jeunes, cette charge militante semble d’autant plus forte que leur participation est bien souvent encadrée, et que leur légitimité à participer à la fabrique et la gouvernance du territoire est soumise à un schème relationnel asymétrique avec les adultes et professionnels (Robin et Séverac, 2013). Aussi les recherches avec les publics jeunes visent-elles à éviter le développement de connaissances adulto-centrées (Nieuwenhuys, 2004) dans lesquelles ils ne se reconnaissent pas forcément (Javeau, 2006). Si les questions d’éthique, de méthodologie et d’épistémologie sont nécessairement prégnantes qu’il s’agisse d’un public enquêté composé d’adultes ou de jeunes (Razy, 2014), elles se poseraient toutefois de manière exacerbée dans le second cas (Morrow et Richard, 1996). Le choix de méthodes qualitatives dans le recueil et l’analyse des matériaux rappelle aussi l’importance de la nature des relations et interactions entre l’équipe de recherche et les participants. La recherche qualitative comme « art de la rencontre » (Jeffrey & Troman, 2004) souligne par ailleurs le rapport de proximité qui s’établit entre chercheur et enquêtés. Si, interroger la participation des jeunes, c’est questionner leur place dans la société (Chiron, 2016), l’accompagner et l’encourager par le biais de nos deux expérimentations reviendrait à s’engager, au même titre que les participants, pour la transformation d’une réalité. La question de la distance au terrain, et en particulier au public enquêté, se pose alors. Par cette communication, nous proposons de partager cette expérience de terrain, en discutant des enjeux de formation à la recherche par l’action, entre pratiques et réflexivité. Deux questions constitueront le fil rouge de notre intervention : comment les interactions avec les participants de la recherche-action ont-elles pu renforcer – sinon construire – un engagement sur et pour le terrain ? Comment enquêter sur – sans enquêter pour – la participation des jeunes à la fabrique de la ville ?