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Les recherches dans le domaine de l’enseignement en milieu rural ont montré qu’à l’issue de l’enseignement primaire, le niveau de connaissances des élèves scolarisés dans une école rurale est égal voire légèrement supérieur à celui de l’ensemble des élèves, et que ces élèves sont généralement moins en retard que les autres.

Cependant, les élèves du milieu rural ne parviennent pas à capitaliser ces bons résultats : ils privilégient en fin de collège des études courtes, avec une préférence pour l’enseignement professionnel, et ont des ambitions scolaires plus réduites. Diverses explications sont apportées à ce phénomène. Certains (R. Rouault, in Jean et al., 2007, p.179-180 ; J.-B. Belliard et J. Colson, 2010) l’attribuent à la morphologie sociale des espaces ruraux, les professions et catégories socio-professionnelles (PCS) défavorisées[1] et moyennes [2] y étant plus largement représentées. D’autres (Y. Grelet et C. Vivent, 2011) mettent en avant l’influence de l’environnement : la famille, mais aussi un effet de territoire, indépendamment de sa morphologie sociale. Les difficultés de mobilité, la diversité moindre des métiers représentés en milieu rural et qui entrent dans le champ des possibles des élèves, l’éloignement et la faible diversité des centres de formation, les perspectives d’insertion professionnelle locale sont autant de motifs avancés pour expliquer la particularité des choix d’orientation des jeunes ruraux. On retrouve cette singularité dans l’ex-Basse-Normandie, où le taux de poursuite d’études est plus faible que la moyenne nationale, ce qui entre en contradiction avec l’injonction nationale d’amener plus de 80% des élèves d’une classe d’âge au baccalauréat.

Le travail de recherche proposé ici vise à mesurer la part réelle de chacun des facteurs avancés pour expliquer les choix d’orientation des jeunes ruraux. En d’autres termes, dans quelle mesure ces choix découlent-ils de facteurs « externes » (offre de formation réduite, difficultés de mobilité…), ou internes, propres aux élèves et à leurs familles ? Dans ce dernier cas, quelle est la part des facteurs socio-économiques, et celle de facteurs qui pourraient tenir davantage d’une forme d’habitus lié à un mode de vie particulier propre au milieu rural et qui persisteraient malgré les profondes recompositions qui l’ont traversé ? Enfin, comment l’institution scolaire s’adapte-t-elle, par le biais de ses différents acteurs, aux singularités d’un tel espace, et dans quelle mesure les pratiques des acteurs de l’institution convergeraient-elles de façon à favoriser certains types d’orientation au détriment d’autres ? Au-delà du constat des inégalités en matière d’orientation que connaissent les jeunes ruraux, il s’agit donc ici de tenter d’appréhender les causes de cet état de fait, et de vérifier si ces inégalités sont toujours d’actualité alors que les espaces ruraux sont profondément renouvelés et recomposés.

Afin de répondre à ces questions, après avoir défini les territoires et compositions sociales des établissements concernés, seront comparés les indicateurs de ces établissements, en termes de résultats et d’orientation (vœux d’orientation, nombre d’inscrits par filière et par spécialité, devenir des élèves après la seconde…) résultats qui seront également confrontés aux données nationales et académiques. En fonction des résultats de ces analyses, des questionnaires et entretiens (élèves, parents, enseignants, chefs d’établissements, conseillers d’orientation…) compléteront ce travail, de manière à comprendre les comportements des acteurs concernés par l’orientation.

L’orientation des collégiens en milieu rural est généralement perçue sous le régime de la contrainte. Il est vrai que ces adolescents choisissent, davantage que les jeunes urbains, des formations courtes via les voies professionnelles, ce que la littérature attribue à un ensemble de causes : un modèle d’orientation prévalent dans les familles populaires, des exemples de possibles moins diversifiés, des possibilités de formation plus rares et plus éloignées, nécessitant une mobilité à laquelle toutes les familles ne peuvent consentir.

Considérant d'emblée une pluralité d'espaces ruraux plus qu'un milieu homogène ou résiduel, ce travail tente de mesurer, outre ces différents facteurs, le pas à pas de la construction des choix opérés sans perdre de vue le poids des collèges eux-mêmes, par une approche essentiellement qualitative associée à des données statistiques. Si le milieu social des jeunes, surtout le diplôme de la mère, induit les demandes d’orientation des adolescents, le caractère socialement situé de ces demandes peut être accentué par les pratiques en cours dans les établissements en matière d’éducation à l’orientation et d’orientation proprement dite, différentes d’un collège à l’autre. Mais il peut également être modulé par les loisirs et les sociabilités amicales et familiales des adolescents, qui y découvrent des pratiques ainsi que des exemples de possibles de formations et de professions.

 


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