Enquêter sur les représentations qu’ont les jardiniers municipaux des usages de l’espace public suivant une perspective de genre révèle la complexité de l’imbrication des relations de pouvoir et des hiérarchisations sociales. En mobilisant la théorie de la minorisation sociale proposée par Colette Guillaumin, cet article montre comment les espaces publics des quartiers populaires sont considérés comme un lieu où se lisent et se disent les inégalités de genre. Au croisement de processus d’altérisation culturelle, de hiérarchisation spatiale et institutionnelle et des rapports de propriété comme de production, les prescriptions de genre sont perpétuées au risque d’une féminisation de l’espace qui maintiendrait la stigmatisation des hommes des groupes minorisés socialement. La centralité du registre moral dans le discours des jardinier∙es rend compte des rapports de cohabitation dans les jardins publics entre différentes fractions des classes populaires.

The study of gender relations in the practices of public space, from the standpoint of the public gardeners, shows the complexity of the intertwined relations of power and social hierarchies. With the theoretical framework of the social minorisation built by Colette Guillaumin, this paper addresses how public servants view the working-class districts as places where gender inequalities are tangible. Cross-cutting issues of cultural alterisation, spatial and institutional hierarchies, property and production contribute to the perpetuation of gender categories, with the risk of aiming for the feminisation of public space, at the expanse of men pertaining to social minorities. Moral discourse is central to the way municipal gardeners describe the uses of public gardens. It is through this discourse that we can understand the relationships of cohabitation between different fractions of the working classes in those public spaces.