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Bien qu’il soit communément associé à la sphère privée et intime, le problème des violences conjugales se trouve influencé par des caractères tout à la fois sociaux et spatiaux. Si les sciences sociales se sont depuis plusieurs années attachées à étudier les déterminants sociaux susceptibles de comprendre ce phénomène, les travaux s’intéressant de manière spécifique aux déterminants spatiaux demeurent à ce jour rares. De plus, en dépit du fait que près de trois quarts des bassins de vie sont définis comme « ruraux » et qu’ils n’abritent aujourd’hui qu’un-tiers de la population française totale, ils concentrent près de 47% des féminicides constatés chaque année. Selon les données exposées par la FNCIDFF à l’occasion d’une table ronde organisée par le Sénat en 2021, seulement 26% des 27 205 appels pris en charge en 2018 par le numéro 3919 provenaient d’une région rurale. Au regard de ces statistiques, les femmes résidant en zone rurale semblent donc moins solliciter les services nationaux d’accompagnement en situation de violences. Dès lors, comment expliquer ce moindre recours aux dispositifs nationaux dans un contexte où l’occurrence des violences conjugales est ainsi confirmée ?

Le présent projet de recherche propose d’interroger la manière selon laquelle les violences conjugales se posent de façon spécifique dans des espaces qualifiés de ruraux. Sur le socle d’une typologie de ces espaces construite sur la base de leurs déterminants socio-spatiaux, économiques et politiques, il s’agira d’analyser les manifestations concrètes des violences de genre et, dans un même mouvement, de caractériser les mécanismes qui sous-tendent dans des lieux donnés la lutte contre ce phénomène.

En prenant comme espaces d’études plusieurs localités rurales représentatives de la diversité des mondes ruraux contemporains, cette thèse interrogera les possibles effets des singularités associés à ces espaces, dans la mesure où ils peuvent non seulement jouer sur la nature et l’intensité des violences conjugales, mais aussi sur l’identification du phénomène et sa prise en charge par les structures associatives et institutionnelles. La recherche portera ainsi à la fois sur l’étude des spécificités liées aux espaces dans le déploiement des rapports de genre, et sur leurs effets dans la question des violences conjugales. Elle s’intéressera aussi aux stratégies d’adaptation mises en œuvre par les femmes victimes, dans les contextes étudiés, en vue de la sortie des violences ainsi que dans le phénomène des violences conjugales en lui-même (ses manifestations et les mécanismes de contrôle spatial mis en œuvre dans les contextes ruraux).

Le travail de thèse sera déployé à l’échelle de quatre départements dont deux situés en Normandie (Orne et Manche), et deux situés d’autres contextes ruraux (Isère et Haute-Garonne). Dans chacun, plusieurs localités serviront de cas d’études mis en perspective au moyen d’une enquête de terrain menée à la fois auprès de populations communales, de femmes ayant vécu des violences conjugales, et auprès d’acteurs institutionnels engagés sur les questions de violences de genre.

En interrogeant « l’effet de lieu » associé aux espaces ruraux et ses répercussions dans le problème des violences conjugales, ce projet de recherche s’inscrit dans le double champ de la géographie sociale et de la géographie féministe. S’intéresser aux violences conjugales dans les ruralités en géographie participe à examiner un thème encore peu exploré de manière systématique dans la discipline, tout en proposant de décentrer l’angle d’analyse pour s’intéresser aux mondes ruraux afin d’en dresser, par la même occasion, un portrait contemporain enrichissant les recherches existantes sur leurs récentes mutations (notamment étudiées, en géographie, dans le mouvement du « tournant rural »).


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