Circulation internationale et changement urbain au Sénégal. Saly ou la fabrique d'une ville cosmopolite à la périphérie de Dakar
David Lessault, Sakho Papa. Circulation internationale et changement urbain au Sénégal. Saly ou la fabrique d'une ville cosmopolite à la périphérie de Dakar. Circulation internationale et changement urbain : perspectives aux suds, Institut Convergences Migration, Jun 2025, Paris Campus Condorcet, France. ⟨hal-05135432⟩
Au Sénégal, nos travaux ont mis en évidence le rôle des transferts financiers des migrants dans l’amélioration de la qualité de l’habitat, qui a lieu à Dakar en dépit de la crise économique et du désengagement de l’État (Lessault, Sakho, 2011). Puis, saisissant les enjeux liés à l’articulation des différentes formes de la mobilité spatiale (migrations internationales, migrations internes, mobilités intra-urbaines) dans l’approche du changement urbain, nous avons proposé une nouvelle lecture du peuplement à Dakar (Lessault, Imbert, 2013). Plus récemment, la diversification et l’enchevêtrement des circulations internationales au Sénégal nous ont amené à considérer « tourisme et migration dans un même système de mobilité international » (Dehoorne, 2002) afin de saisir de nouvelles composantes du changement urbain. En poursuivant son étalement sur le périurbain littoral, l’aire métropolitaine dakaroise connaît en effet un changement d’échelle significatif. Elle englobe les petites localités touristiques de la Petite Côte qui s’égrènent désormais selon un front d’urbanisation continu jusqu’à Saly qui, bien que située à 80 kilomètres du centre de la capitale, devenant une banlieue résidentielle aux airs cosmopolites (Fournet-Guérin, 2017). Deux principaux facteurs imbriqués sont à l’origine de cette nouvelle forme de production urbaine : la politique des grandes infrastructures orchestrée par le gouvernement sénégalais depuis une quinzaine d’années et, l’installation croissante de populations européennes qui s’inscrit dans le sillage de la dynamique d’un tourisme international balnéaire initiée dès les années 1970. La relocalisation périphérique de l’aéroport international et la mise en service de l’autoroute à péage entre Dakar, Thiès et M’Bour ont permis de favoriser deux formes de mobilité : la mobilité résidentielle des Dakarois vers des espaces littoraux et de loisirs et, la circulation migratoire des populations européennes (majoritairement françaises ; Bredeloup, 2016 ; Quashie, 2016) et des membres de la diaspora sénégalaise (Lessault et al., 2024). Aujourd’hui, la complexité croissante des mouvements migratoires mondialisés amène ces dynamiques de mobilité à se superposer. Notre communication mettra en lumière l’effet conjugué des circulations résidentielles (dakaroises) et migratoires (à la fois européennes et sénégalaises) dans la fabrique d’une ville nouvelle à Saly. En nous appuyant sur les données récemment collectées dans le cadre du projet collectif CIRCUS (Circulation internationale et recompositions urbaines au Sénégal – 2022/2024), nous analyserons cette dynamique du changement urbain selon deux angles d’approche. Le premier retracera les grandes étapes du passage de la petite station balnéaire satellite à une banlieue résidentielle de Dakar. Le second s’attachera à saisir, au moyen de parcours biographiques d’habitants et de « circulants » (Dureau, Imbert, 2014), la diversité des processus d’ancrages qui conduisent à la production d’un espace urbain cosmopolite mais fortement ségrégué socialement.