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Le surf : un intérêt politique progressif. Deux décennies de recherches sur le terrain marocain
Christophe Guibert. Le surf : un intérêt politique progressif. Deux décennies de recherches sur le terrain marocain. TSE. Surf, société et territoire. Vers une compréhension globale de l’écosystème surf de Taghazout, pp.18-25, 2023. ⟨halshs-04324378⟩
L’analyse du développement qualitatif et quantitatif des loisirs tels que les activités sportives nécessite une lecture longitudinale et historique adossée à de multiples processus. La prise en compte des politiques publiques, de l’échelle locale à l’échelle d’un Etat, renseigne à bon compte sur la transformation des représentations d’une part (les valeurs, les idéologies) mais aussi les actions concrètes d’autre part (soutiens aux associations et aux fédérations sportives, budgets ministériels, construction d’équipements, etc.). Si les politiques publiques sportives à l’égard de sports comme le football ou encore l’athlétisme reposent, au Maroc, sur des engagements structurants datant de plusieurs décennies (le parcours de l’équipe marocaine de football à la dernière Coupe du Monde le confirme), d’autres sports, tel que le surf sur le littoral atlantique, se caractérisent par leur autonomie longtemps séculaire à l’égard des politiques sportives locales et étatiques (Guibert, 2008). Toutefois, cette autonomie avec pour conséquence de faibles budgets, une structuration fédérale modeste, un intérêt des élus locaux pour le moins « distant », etc. semble se disloquer au profit d’un réelle attention des collectivités locales depuis quelques années. Si l’économie touristique liée à la commercialisation de services sportifs (découverte, initiation, stages) proposée par des entreprises – les « écoles de surf – auprès d’une clientèle internationale (européenne surtout) n’est pas nouvelle, la prise en compte par le champ politique de cet univers économique singulier est, quant à lui, assez récent. Le Taghazout Surf Expo organisé dans le village éponyme, haut lieu du surf marocain depuis plusieurs décennies, constitue à n’en pas douter un point de bascule, une sorte d’accélérateur dans la prise en compte des enjeux précités. La première édition de 2022 et l’édition de 2023 attestent d’une reconnaissance du surf au Maroc à la fois par les entreprises et sponsors privés ou encore par la présence de nombreuses entreprises spécialisées internationales. Les retombées médiatiques de l’événement dépassent également largement l’audience classiquement mesurée lorsqu’il est question de surf dans le Royaume. Mais surtout, ce sont les ateliers et tables rondes organisées en présence des élus locaux et des représentants des institutions d’Etat et autres ministères qui assurent une dimension particulièrement intéressante à ce type de manifestation. Un retour en arrière, à l’aune d’un terrain de recherche mené au début des années 2000 témoigne d’une sorte de « révolution copernicienne » dans la perception du poids que peut représenter économiquement et touristiquement le surf sur le littoral marocain.