Suite au ciné-concert, l’échange avec la salle souligne la grande force et sensibilité du spectacle proposé, qui n’est pas une mise en scène directe de l’ouvrage de Nicolas Legendre mais qui transmet, par la combinaison d’images d’archives, de vidéos contemporaines, de dialogues enregistrés, de poésie et de musique rock, de rendre sensible la complexité des sentiments qui traversent les paysans et les paysannes d’aujourd’hui. Les artistes expliquent leur enquête auprès de fermes et dans les paysages modernisés du Finistère et la manière dont ils ont construit leur proposition artistique. La question de l’anonymat relatif des sources est discutée. Yvon Le Caro pointe l’intérêt des archives de l’INA pour percevoir que le modèle agricole breton s’est construit entre 1952 et 1962 sous la forme d’une Révolution (dite silencieuse), l’arasement des talus comme la mort du cheval venant acter le meurtre symbolique du père paysan patriarcal et de sa civilisation paysanne par le jeune agriculteur professionnel ; ce qui explique en partie la violence des réactions ultérieures contre toute tentative post-moderne, interprétée comme contre-révolutionnaire dans le contexte agro-alimentaire breton. Il confirme la difficulté, pour les jeunes agriculteurs des années 80-2010, à opérer sur la ferme de leurs parents la réorientation agro-écologique nécessaire, tout en rapportant leur intérêt marqué pour les expériences menées à la ferme par les précurseurs, lorsque le lycée agricole ou le développement agricole leur permet de les rencontrer. Il suggère que ce spectacle, qui interroge mais respecte les doutes et les fractures intérieures des agriculteurs engagés dans la modernité agricole, puisse être proposé dans des enceintes agricoles comme opportunité de libérer une parole trop souvent autocensurée.