Genre, corps, espace
Si les espaces sont façonnés par les politiques publiques, Pierre Bourdieu et Henry Lefebvre ont montré qu’en retour ces lieux de vie façonnent aussi les rapports sociaux, et notamment ceux de genre. Ainsi localisée, cette problématique gagne en visi- bilité et en pertinence. Ces processus en situation sont étudiés ici par une équipe de neuf chercheures de l’université Rennes 2. Elles proposent une analyse transversale très élo- quente des enjeux de genre à l’œuvre dans les espaces de nos sociétés modernes. L’étude est menée parallèlement dans divers champs discipli- naires (sociologie, psychologie, sciences des acti- vités sportives, littérature…) et selon une approche intersectionnelle articulant rapports d’âge, d’origine et de classe. L’analyse est également historique (du XVIII e à nos jours). En effet, des similarités peuvent être repérées de la cour de Marie-Antoinette aux quartiers populaires contemporains. Les femmes et les hommes restent assujetti·e·s aux normes de genre qui façonnent les corps et l’espace de leur époque ; tou·te·s se conforment ou tentent de résister aux injonctions sociales d’incarnation d’un modèle présenté comme idéal. Une étude de genre – où le féminin n’est pas traité séparément mais bien dans son interaction avec le masculin – ne peut éviter un état des lieux critique des rapports de domination : par-delà les compor- tements de surenchère induits par la performance des rôles sociaux, cette étude s’attache aussi au parti pris (souvent insidieux, parfois spectaculaire) d’exclusion ou d’invisibilisation du féminin dans l’espace. Par-delà les schémas récurrents, sont éga- lement développées quelques tentatives, souvent fictionnelles, de totale subversion. Autant de scénarios proposés ici, qui sont révélateurs des grandes évolutions sociétales de notre temps.